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affiche Construire, déconstruire, reconstruire les sciences sociales : Réfléchir les défis du religieux (REFLEX) Ce colloque a pour ambition de réunir des chercheuses et chercheurs à l’échelle nationale et internationale autour de la « question religieuse » comme levier de réflexion sur la pratique et le développement des sciences sociales, à partir de questionnements sur la situation des sciences sociales du religieux, sur les institutions qui leur donnent site, sur la cartographie mondiale de ces sciences dans la dynamique de leur circulation, et sur leur fonction sociale. Aujourd’hui, peut-être plus que jamais au cours des dernières décennies, la question du religieux traverse tous les domaines de la vie sociale, de la sphère intime à la tribune publique, ainsi que les discours scientifiques qui tentent de l’appréhender. Ce « renouveau » de la question religieuse bouscule les paradigmes à partir desquels les sciences sociales se sont construites et invite à repenser la manière dont l’objet « religion » ne cesse de travailler nos disciplines. L’exigence d’une telle réflexion nous a imposé le projet d’un dialogue entre des acteurs de toutes disciplines, issus de divers cadres institutionnels et contextes socio-politiques et culturels, pour apporter des éclairages circonstanciés, sur la longue durée et dans un espace culturel élargi. Dans cette perspective, « la question religieuse » est plurielle et semble réfléchir des défis de plusieurs ordres que l’on peut regrouper en trois thèmes majeurs autour desquels ce colloque international s’organisera : 1. Espaces et lieux de production des savoirs ; 2. Traductions et circulations des concepts, des catégories et des objets ; 3. L’éthique, le politique et la cité. Espaces et lieux de production des savoirsLa question des relations entre les différents contextes de savoir doit être appréhendée en fonction de leurs espaces et de leurs lieux de production. Dans quels cadres et dans quels environnements se fabriquent les sciences sociales du religieux ? Dans quels secteurs du champ académique sont-elles produites ? Existe-t-il des spécificités ou des singularités selon les différentes structurations académiques nationales ? Dans certains contextes, des lieux situés à la frontière, voire en dehors du champ académique ont par ailleurs pu suppléer ou se substituer aux institutions proprement académiques. Les musées d’anthropologie ont pu, par exemple, être à l’origine de la production et de l’enseignement des sciences sociales (comme ce fut le cas de certaines institutions muséales brésiliennes ou mexicaines). Dans d’autres contextes, les écoles religieuses, les divinity schools ou les centres théologiques ont constitué des foyers d’échanges et de productions des sciences sociales du religieux, comme c’est le cas de certains établissements en Suède, au Sénégal, au Maroc ou encore aux États-Unis. Dans d’autres sociétés, sous domination idéologique d’États autoritaires, ce sont des lieux hétéroclites et hors institutions qui assurent une production plus libre et émancipée des sciences sociales du religieux, comme c’est le cas dans l’Iran actuel ou comme ce fut le cas dans les démocraties populaires de l’époque communiste. Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Quels sont les lieux de la genèse des sciences sociales du religieux dans diverses traditions académiques ? Quelle place occupent-ils dans le paysage institutionnel ? Une comparaison à la fois synchronique et diachronique des différents espaces géographiques de production de savoir sur la « religion » ou sur le « religieux » (de l’Europe aux Amériques en passant par l’Afrique et l’Asie) permettra de rendre compte de la diversité et de la richesse de ces lieux de production de savoir à travers le monde. Ce panel interrogera les singularités des contextes académiques et nationaux dans la production des savoirs sur l’objet « religieux ». Traductions et circulations des concepts, des catégories et des objetsLa traduction et la circulation des concepts et des catégories qui servent à définir et à penser le religieux constituera une thématique transversale du colloque, à la fois comme objet de réflexion en lui-même et comme réflexion sur les pratiques de traduction et sur les logiques de circulation propres aux chercheuses et chercheurs. Après avoir porté dans le premier panel notre intérêt sur les logiques de constitution des traditions de recherche singulières, ce deuxième panel s’intéressera plus spécifiquement aux porosités et aux relations entre ces différents espaces. Il s’agira tout d’abord d’examiner les enjeux de la traduction des catégories émiques du religieux en catégories dites scientifiques et d’interroger les éventuels effets de retours sur les catégories internes du religieux. Nous interrogerons ici la manière dont les protagonistes parlent de leurs propres expériences religieuses, des catégories utilisées pour lui donner sens, en relation au travail de la chercheuse ou du chercheur qui traduit cette expérience dans le discours des sciences sociales. Nous interrogerons aussi la pertinence de mobiliser ou non des catégories scientifiques traduites d’un univers religieux spécifique pour saisir des phénomènes extérieurs à cet univers : peut-on parler de « conversion » ou même de « religion » à propos du judaïsme, de l’islam, du bouddhisme ou des « religions » afro-brésiliennes ? Il s’agira dans un deuxième temps de questionner la traduction des concepts des sciences sociales du religieux, en relation à leur développement historique et à la création de leur objet. Comment traduire des catégories comme « conversion », « écriture sacrée », ou « autorité religieuse » d’une langue et d’une tradition analytique à une autre ? En nous appuyant sur des expériences de traduction ou de constitution de lexiques communs, le but sera ainsi de réfléchir aux catégories élaborées par les sciences sociales en relation avec les langues, et donc nécessairement avec les espaces et les lieux de leur développement. Nous interrogerons enfin la pertinence même des efforts de traduction de la catégorie « religion ». Depuis les années 1990, la critique postcoloniale a questionné l’universalité des catégories de « religion » et de « sécularité-sécularisation » avec, notamment, les travaux de l’anthropologue Talal Asad, qui interpellent l’idée même de « religion » ou de « religieux » comme autant de notions produites par l’Occident et ne s’appliquant pas – nécessairement ou identiquement – à d’autres contextes, allant des « traditions discursives » de l’islam ou du judaïsme aux « religions » coutumières africaines ou afro-diasporiques. Ce panel s’intéressera plus particulièrement à la manière dont ce programme de réévaluation critique de la catégorie religion s’est diffusée, puis adaptée aux différents contextes géographiques, linguistiques et académiques. Loin d’être homogène, la critique postcoloniale connaît en effet des appropriations différenciées selon les enjeux locaux qui traduisent autant des effets de globalisation que des logiques de « diasporisation » des paradigmes et des catégories. L’éthique, le politique et la citéNous interrogerons les porosités et les interfaces qui peuvent exister entre production des savoirs et politique. En France par exemple, la légitimité de la recherche s’appuie notamment sur l’idée – peut-être trompeuse ? – de son autonomie acquise vis-à-vis du religieux et du politique. Par-delà le cas spécifiquement français, cette autonomie reste à questionner au regard de la manière dont les sciences sociales du religieux se sont construites dans leurs différents contextes sociaux et politiques et en regard des contraintes politiques qui pèsent aujourd’hui sur la production des savoirs. Des courants théoriques pluriels se sont formés à partir d’héritages hétérogènes, liés à la spécificité de chaque objet, de chaque contexte national de recherche, mais aussi à des positionnements idéologiques divers. Dans cette configuration, nous proposons d’interroger plus particulièrement l’injonction croissante à l’expertise, qui n’est pas sans conséquence sur la manière dont la recherche construit ses objets. L’étude des faits religieux a été et reste aujourd’hui l’instrument d’une compréhension des faits sociaux, et plus singulièrement l’instrument d’une compréhension critique des règles et des normes sociales, c’est-à-dire d’une interrogation sur leurs fondements. Mais elle est aussi, pour cette raison même, un signal d’alerte sur l’ordre social. En sorte que les « spécialistes » du fait religieux, dans ou hors du champ scientifique, sont sollicité.e.s et interviennent parfois dans un temps très court de l’actualité – à l’inverse des démarches savantes, lentes et patientes, que leur objet requiert. Dans quelles proportions la recherche académique et l’expertise se tiennent-elles en fonction des situations sociales spécifiques ? Comment l’éthique de la recherche se situe-t-elle dans ce double contexte ? Comment ces questions se posent-elles et quel est leur niveau de pertinence selon les différents contextes politiques, culturels et religieux où sont produites les sciences sociales ? Ces questions interrogent en filigrane leur niveau d’indépendance vis-à-vis de l’État, et par conséquent, le niveau d’autorité politique et religieuse que celui-ci peut exercer sur elles. Lorsque cette indépendance est forte, la stratégie de l’État est de moduler le financement de la recherche en fonction des thématiques qui le préoccupent ; dans le cas contraire, les sciences sociales usent de tactiques pour augmenter leur espace d’autonomie. Découvrez notre teaser : |
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